PORTRAITS

Lorsque je réalise un portrait, je ne m’attache pas à la vérité des êtres mais à leur mystère.
Je ne cherche pas à savoir, ni à comprendre, ni même à imaginer, ce qui se joue "derrière" les regards. Ni quels drames ou quelles noces se profilent.
La seule chose qui compte finalement alors est le sentiment que je perçois d’être totalement et "en conscience" AVEC les êtres que je m’apprète à photographier.

A cet instant, et pour un instant seulement, on peut dire que ces êtres s’abandonnent "en conscience" à la confiance. Ils me font confiance, sans négociation, sans ultimatum et sans contrepartie.

La photographie ne témoigne alors que de cet état de présence consciente.

La beauté de ce geste (de ce don de soi) me coupe le souffle et me laisse sans voix.
Cette étrangeté me bouleverse.
Si ensuite, je parviens à rendre visible les inconnus et les splendeurs potentielles que chacun porte en soi, alors j’entrouvre la porte des mystères.

Les êtres que je photographie deviennent mes frères, soeurs, amants, enfants, parents.
Résolument proches et monstrueusement étrangers.

Chacun, à sa manière semble poser la même question : "et toi là, que fais-tu de ta vie ?
Et chaque photographie amplifie et porte encore plus loin la question sans la résoudre jamais.